Pour célébrer la mémoire de Xavier Grall, disparu en 1981, les éditions Calligrammes viennent de publier « Xavier Grall, Œuvre poétique », une magnifique anthologie.
Tous les ans, Encyclopedia Universalis, une des plus prestigieuses encyclopédies, publie un imposant ouvrage de synthèse sur les principaux événements de l’année précédente. Une partie est consacrée à la biographie des personnalités disparues, où il est rare de trouver des poètes français, plus encore des Bretons. Dans sa livraison de 1982, elle avait retenu, pour le monde entier, neuf poètes, dont Georges Brassens et… Xavier Grall disparu le 11 décembre 1981, à 51 ans.
Dans son hommage, André Laude, autre vieil ami envolé, écrivait : « Xavier Grall – et c’est là toute sa grandeur – ne cessa d’être ébranlé par les tragédies modernes… Jamais il ne se déroba. Et par-delà ses amis proches – Glenmor, Yvon Le Men, Dan Ar Braz, Georges Perros, Youenn Gwernig – il embrassait, embrassait, par son verbe, la terre des hommes ».
Voilà donc quarante ans que Xavier Grall flirte avec cet ankou qui le hantait, mais moins, heureusement, que le soleil du Maghreb et la lumière de Bretagne. Pour célébrer sa mémoire, les éditions rennaises Calligrammes viennent de publier « Xavier Grall, Œuvre poétique ». Cette maison, créée par Bernard et Mireille Guillemot qui furent ses derniers et fidèles compagnons, est on ne peut plus légitime pour nous offrir la meilleure sélection de ses poèmes. Les Guillemot, en effet, ont réédité beaucoup de ses livres avec ce souci d’une présentation très soignée, du bel objet. Yvan, leur fils, a su perpétuer cette noble tradition qui, hélas, se perd…
Une force tellurique
« Œuvre poétique » s’ouvre sur un beau texte d’Yvon Le Men qui confie : « Dans l’ombre de la pièce, ses yeux noirs semblaient briller comme du fond d’un puits d’où se refléterait un autre monde. J’étais fasciné ». Comme lui, beaucoup le furent, fascinés… Xavier Grall est commandé par une force tellurique qui, pour notre bonheur, lui donne cette puissance si pleine de compassion virile, si véhémente parfois. Espérance et déchéance, amour et pitié s’embrasent. Ses brûlures et son idéal enjambent toutes les frontières. « Quels sont vos rêves ?, lance-t-il. Ils sont célestes. Quelles sont vos fêtes ? Nocturnes, musicales. Quels sont vos paradis ? Charnels, fraternels. Que voulez-vous pour la Bretagne ? Tout. Qui êtes-vous ? Des illuminés… »
« Œuvre poétique » a, bien sûr, retenu, « La Sône des pluies et des tombes », « Genèse », « Kerouac Song »… Et, surtout, « Solo », un poème tellement habité, tellement particulier. Unique, sublimé par une pudeur, une émotion contenues.
Annie Kerhervé, dans sa postface très documentée, résume l’itinéraire de cet élu du Parnasse celtique. Ce qui permet au lecteur de le suivre dans ses tumultueux méandres.